Dans nos sociétés contemporaines, le citoyen ne se satisfait plus de donner son avis par le seul biais des urnes : il revendique, dans les projets qui ont un impact sur son environnement, une légitimité égale à celles du politique et de l’expert. A travers internet et l’émergence de nouvelles solidarités (associations, collectifs…) se développe ainsi un phénomène d’expertise citoyenne qui trouve une caisse de résonance dans les réseaux sociaux.
Encadrée dans un processus de concertation, cette évolution contribue à améliorer et à renforcer la légitimité des projets. Mais elle peut aussi déstabiliser des projets d’infrastructure ou d’aménagement du territoire, généralement portés par des entreprises imprégnées d’une culture de l’expertise technique et scientifique et qui n’ont pas toujours les codes pour comprendre et gérer l’expression citoyenne. Certains projets sont alors remis en cause par une opposition qui prend des formes diverses (recours juridiques, blocages, pétitions en ligne…) et qui interpelle le politique et les médias.
Pour éviter d’en arriver à de telles extrémités, les entreprises ont tout intérêt à intégrer les citoyens dans leurs réflexions en mettant en place dès la conception de leurs projets des dispositifs de concertation ou de dialogue citoyens, en amont mais aussi en aval des décisions d’engagement.
Un nombre croissant d’entreprises se lancent dans la concertation, y compris quand celle-ci n’est pas rendue obligatoire par la législation. Ce mouvement conduit à une évolution des pratiques de concertation, à l’épreuve du terrain et de nouveaux acteurs, ainsi qu’au développement d’un véritable écosystème de la concertation. Atlante est allé à la rencontre de certaines d’entre elles pour recueillir les bonnes pratiques.
SNCF Réseau, pour une diffusion large de la culture de la concertation
Julie Taldir, Directrice concertation et relations extérieures de SNCF Réseau
« Le développement du TGV, amorcé dans les années 1990 s’est accompagné par un renforcement de la participation du public à l’élaboration des projets de nouvelle ligne ferroviaire. Ces lignes font l’objet d’une procédure de débat public, fixée réglementairement et encadrée par la Commission nationale du débat public. Exigeantes, ces procédures ont rendu rapidement nécessaire une professionnalisation des équipes, avec le recrutement de concertants au sein des missions des grands projets. Les grandes orientations de la politique ferroviaire ont ensuite évolué en donnant la priorité à la modernisation du réseau. Les objets de concertation se sont alors diversifiés avec des plus petits projets de moindre ampleur : création de halte, suppression de passage à niveau, amélioration de l’exploitation …
Depuis plusieurs années, la concertation a été intégrée au management des grands projets comme un des incontournables à connaître pour tout gestionnaire de projet. L’enjeu est désormais de diffuser cette culture du dialogue avec les parties prenantes à l’ensemble des directeurs de projets. »
La Société du Grand Paris au contact du terrain
Isabelle Rivière, Directrice des relations institutionnelles à la SGP
« L’organisation d’une concertation renforcée permet de nourrir le projet des enjeux propres à chaque territoire, expliquer les travaux, et préserver les activités économiques et la vie quotidienne des riverains. Pour ce faire, le contact avec le terrain est essentiel : il est ainsi nécessaire pour les responsables de la SGP accompagnés des chefs de projet secteur (qui suivent 1 à 2 gares de la phase étude jusqu’aux travaux) de se rendre régulièrement sur le terrain, d’échanger avec les habitants et les élus, de les écouter.
Cette sensibilité territoriale se prolonge en une véritable co-construction du projet et va au-delà de la seule conformité aux normes en vigueur. L’adhésion des élus est une des clés de réussite de la démarche de concertation, et, au-delà, de l’ensemble du projet. Cette adhésion est le résultat de l’ancrage territorial fort de la SGP, grâce à l’implication de la direction des relations territoriales. Ces liens ont été renforcés dès la fin du débat public avec un travail quotidien mené avec les élus, toutes tendances confondues, et via des comités visant à échanger et à arbitrer tout au long de l’avancement du projet. »
RTE innove dans la concertation
Claire Grandet, Directrice du Département Concertation et Environnement de RTE
« Une part importante du travail réalisé par le département Concertation et Environnement consiste à faire de la prospective sur le thème de la concertation. RTE participe ainsi à des groupes de travail et des groupes de réflexion au niveau français ou européen sur la concertation. Par exemple, RTE a participé au projet européen INSPIRE-GRID qui visait à étudier des externalités positives des lignes. Les activités liées à la concertation sont placées sous l’autorité d’un membre du directoire, et font également partie de la direction de l’ingénierie. Ce double rattachement dénote une volonté de bien intégrer la concertation à la conduite des projets avec une dimension territoriale. RTE a aussi souhaité associer au sein d’une même structure les compétences liées à l’environnement et à la concertation que ce soit au niveau national ou local. »
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