L’empreinte d’eau de la France est de 110 milliards de m3 par an et de 1 786 m3 par Français : sa maîtrise est un objectif capital dans un contexte de restriction des ressources et de sensibilisation des citoyens à la réduction de leur consommation d’eau.
Quelques faits et chiffres pour comprendre les enjeux autour de la mise en place d’un comptage intelligent de la consommation d’eau.
Des acteurs éparpillés…
Contrairement à la distribution d’électricité et de gaz, il n’y a pas de distributeur unique en monopole régulé. La distribution d’eau est gérée en régie par les services des collectivités locales, ou en délégation de service public (DSP).
De nombreuses sociétés privées de distribution d’eau sont en délégation de service public. La mise en concurrence systématique des candidats à chaque renouvellement de contrat, d’une durée moyenne de douze ans, est encadrée par la loi Sapin de 1993. Les délégations de service public incluent le développement durable dans les besoins de service exprimés. Les entreprises de l’eau ont un périmètre de 15,3 millions de compteurs pour l’eau potable.
Et des canalisations vieillissantes
La moitié des canalisations actuelles datent d’avant 1972 et 20% datent d’avant 1960. Or, en plus de leur âge avancé, elles sont en fonte ou en acier, ce qui les rend cassante, et multiplie les fuites. Le rendement du réseau de canalisations français tous opérateurs confondus et pondéré par les volumes mis en distribution était de 78% en 2008, soit 22% de pertes. Pour les réseaux d’eau potable gérés par les entreprises de l’eau, le taux de rendement était de 81% en 2010, soit 19% de pertes.Une piètre performance, notamment dans le contexte de pénurie dans certaines régions. Or, l’objectif du Grenelle II vise un rendement de 85% en 2017. Les investissements dans la maintenance et le renouvellement des réseaux de canalisation est donc un enjeu clé du secteur, notamment pour optimiser la consommation d’eau.
Un besoin de mesurer efficacement l’eau consommée et de solutions de mesures flexibles et interopérables
Les compteurs intelligents (smart meter) permettent de mesurer et de maîtriser la consommation des ressources (eau, électricité, gaz…) et de facturer sur un index réel. Les compteurs intelligents en eau permettent aux consommateurs de mieux appréhender leur consommation pour mieux la maitriser et, aux gestionnaires de réseau de pouvoir repérer plus facilement les fuites dans le réseau pour optimiser leurs investissements. Du fait de la multiplicité des acteurs, l’interopérabilité des solutions retenues et la standardisation sont des enjeux importants pour favoriser le déploiement de ces compteurs afin d’améliorer la viabilité économique des projets de déploiement de compteurs intelligents, qui nécessitent des investissements lourds dans de nouvelles infrastructures de communication. Le compteur transmet les données à un émetteur radio, puis à une borne Internet, puis au cloud auquel accèdent le ou les portails des exploitants, et le consommateur depuis un site Internet ou une application. Des alertes SMS ou par mail en cas de consommation anormale permettent de détecter les fuites. Au-delà des compteurs, des capteurs intelligents peuvent être posés aux points sensibles des canalisations afin d’étudier les écarts entre consommation finale et injection sur le réseau.
Un marché prometteur
En 2010, seuls 9% des 15 millions de compteurs gérés par les entreprises de l’eau étaient connectés. Le marché de la « smart water economy » n’en est donc qu’à ses débuts et des entreprises se rapprochent afin de créer des filiales et d’investir ce secteur. Par exemple, Veolia Eau et Orange ont créé une filiale commune baptisée m2ocity en 2011 afin de proposer une offre de télé-relève de l’eau. La société accompagne donc des collectivités locales et des entreprises de l’eau dans leurs projets de déploiement de compteurs intelligents d’eau sur leur territoire, au Havre ou à Marseille par exemple. Contrairement aux grands projets français de déploiement de compteurs intelligents de gaz et d’électricité, le territoire français sera probablement couvert petit à petit suivant le puzzle des autorités locales en charge de la distribution publique de l’eau, au nombre de 15 000 pour l’eau potable et autant pour l’assainissement. Sur le territoire de chaque autorité, celle-ci ainsi que l’exploitant devront parvenir à un accord pour garantir la viabilité économique de ces nouveaux investissements.