Prévue d’être publiée au Journal Officiel prochainement, la PPE achève son long périple de 2 ans à travers différentes étapes de consultation et de concertation. Quel a été ce parcours ? Quel bilan en tirer ? Quelles différences entre la version proposée par l’Exécutif et celle sortie du deuxième tour de concertation ? Retour arrière sur un décret hors du commun.
Un parcours long et semé d’embûches pour une approche novatrice
La sortie de la PPE a connu un parcours unique et inédit en France. Pour définir la feuille de route énergétique française, la société civile et le grand public ont été consultés par l’Exécutif. Chose atypique : la consultation ne portait pas sur un projet défini et sur un périmètre local, mais sur un Programme à un niveau National. Pour cet exercice sans précédent, un processus encadré de Débat Public a été mis en place par la CNDP. Premier en son genre, ce processus a été globalement une réussite. Il a rencontré un bon écho auprès du public et les modalités du débat ont été jugées globalement fructueuses.
Ce n’était cependant qu’une étape parmi d’autres. Comme le montre l’illustration ci-dessous, le parcours pour arriver à la version finale a été long. Depuis les conclusions du Débat Public (qui ont permis au Gouvernement d’annoncer les grandes lignes de la PPE) jusqu’à la publication au Journal Officiel, la PPE est passée par de multiples étapes impliquant toutes les parties prenantes :
La publication de la première version en janvier 2019 s’est poursuivie par un « deuxième tour » de consultation : d’abord avec les instances consultatives institutionnelles au premier semestre 2019, puis avec le public au second semestre. Cependant, le mouvement de contestation des Gilets Jaunes, qui naît à l’automne et se prolonge dans les mois suivants, complique les arbitrages du Gouvernement sur beaucoup de sujets, dont l’énergie. Le calendrier s’étire, et certains points soumis à consultation ne sont pas encore arbitrés, tels que le sort de la fiscalité carbone ou les sites de productions nucléaire à fermer en priorité.
La PPE poursuit néanmoins son parcours. De nombreux acteurs institutionnels ont été rencontrés au premier semestre 2019 pour recueillir leurs avis et remarques. On peut citer par exemple l’autorité environnementale, le Conseil national de la Transition énergétique, le Conseil supérieur de l’énergie, le Conseil de Gestion des charges de service public de l’électricité ou le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique… Les échanges sont même sortis de l’Hexagone, avec l’implication des administrations des pays limitrophes comme l’Allemagne, l’Espagne ou le Luxembourg.
A la suite de cette phase, une concertation post-débat a également eu lieu. Elle s’est déroulée en même temps que le processus législatif, donnant lieu à la publication en septembre 2019 de la Loi Energie Climat, nécessaire pour intégrer dans la loi les différentes réorientations qui ont émergé lors des consultations.
La deuxième version de la PPE est finalement publiée en janvier 2020 et soumise à consultation par voie électronique au grand public du 20 janvier au 20 février 2020. L’Exécutif en publiera prochainement la synthèse des contributions, avant l’étape finale de publication au Journal Officiel.
Dans le fond : quels changements entre les deux versions ?
Entre la première version publiée en janvier 2019, et celle soumise à consultation du grand public en janvier 2020, plusieurs modifications ont été apportées.
Il ressort que la nouvelle PPE issue du deuxième tour de consultation est plus ambitieuse : la volonté de réduire notre consommation d’énergie a été réaffirmée. Dans le même temps, l’accélération du verdissement du mix énergétique a été consacrée, avec une revalorisation des objectifs de capacités installées, principalement dans l’éolien.
Pour autant, elle ne donne pas entière satisfaction à tous les acteurs de la filière, comme par exemple ceux de la branche biométhane, qui ont vu leurs ambitions initiales rognées, puis légèrement corrigées après le deuxième tour de consultation, grâce à la révision du tarif d’achat.
Quelles conclusions tirer de cette première expérience ? La PPE qui sortira prochainement au JO, avec une date suspendue à la crise du Coronavirus, donne un feuille de route énergétique cohérente jusqu’en 2028 et sort grandie du deuxième tour de consultation.
Sur la forme, si le Débat public a été globalement une réussite, la concertation post-débat fait un peu figure du « parent pauvre ». Au vu de la complexité du processus et des différentes actualités sociales qui ont bouleversé le calendrier, le jugement doit cependant être lucide : l’expérience est une première, et – dans les mots de J. Archimbaud, vice-président de la CNDP, « malgré ses imperfections, [elle] inaugurera une situation irréversible au-delà de laquelle aucune décision majeure ne pourra se rendre, sur des sujets aussi clivant, sans concertation »[1]. Cet inédit a été riche d’enseignements. Aux différents acteurs maintenant de s’en saisir, pour apporter des améliorations, et construire ensemble l’avenir énergétique de la France.
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[1] J.Archimbaud, lors de la réunion de clôture du Débat Public, le 29 juin 2018, au CESE. Cité dans le compte-rendu du Débat Public, 30 août 2018.