Il ne reste que quelques semaines avant le premier tour des présidentielles, et pourtant, les enjeux énergétiques ne sont abordés qu’épisodiquement, en fonction d’évènements médiatiques comme Photowatt ou le record des prix à la pompe. Afin d’y voir un plus clair sur les programmes des candidats, Atlante & Cie vous propose un tour d’horizon des propositions des principaux candidats.
Après un premier post sur Marine Le Pen, intéressons nous à l’unique candidat centriste de cette élection, le président du Modem, François Bayrou.
Les principales propositions de François Bayrou sur l’énergie sont l’organisation d’un débat sur l’avenir de la production électrique, un objectif de 40% d’énergie renouvelable (EnR) dans la production électrique d’ici 2030, la création d’un “fond d’investissement dédié au développement durable”, et une ambition de rénovation des bâtiments. Cependant, ces propositions sont peut étayées et le candidat laisse de côté beaucoup de problématiques : il n’aborde pas dans son programme d’autres énergies que l’électricité, et est assez flou sur le mix électrique en dehors de son objectif ambitieux sur les EnR.
Mix énergétique
Concernant l’électricité et pour se positionner sur le nucléaire, le candidat propose d’organiser un « débat sur l’avenir de la production électrique en France » afin de définir un mix électrique à l’horizon 2030 et une « feuille de route » pour l’atteindre.
Le candidat du Modem a l’ambition de réduire le recours aux énergies carbonées parallèlement à un « développement massif » des EnR : en 2030, les EnR devrait atteindre 40% de la production électrique française (contre près de 15% aujourd’hui). Pour encourager ce développement, le candidat propose de « stabiliser et simplifier leurs règlementations » sur les 20 prochaines années (demande récurrente des professionnels), de « créer un consortium européen de l’énergie renouvelable », d’alimenter le capital des projets industriels d’énergie renouvelable et de financer la recherche dans les EnR avec le nouveau “fonds d’investissement dédié au développement durable”.
Parallèlement à ses ambitions pour les EnR, le candidat envisage le nucléaire comme une « énergie de transition utile » mais il ne donne pas la composition cible des 60% restants du bouquet électrique pour 2030 et ne se positionne pas sur le renouvellement du parc nucléaire français. Il est opposé à la construction d’une nouvelle centrale thermique à gaz dans le Finistère mais ne se prononce pas sur le déséquilibre électrique en Bretagne.
Il réaffirme cependant que la « sécurité des installations [nucléaire] est non négociable » : pour cela, François Bayrou souhaite “conforter l’indépendance de l’Agence de Sureté Nucléaire”.
Accès à l’énergie
François Bayrou s’est positionné sur la surinflation des prix du carburant en excluant toute réduction des taxes. Il oriente cependant, pour contrôler cette hausse, vers le renforcement de la concurrence dans le raffinage pour faire baisser les prix.
Les marges des distributeurs (raffinage et commercialisation) n’ont, en effet, pas cessé d’augmenter ces 10 dernières années. C’est la conclusion d’une étude de l’association CLCV, qui souligne que, pour le sans-plomb 95, la marge distributeurs est passée de 8 centimes d’euro par litre de carburant, en 2001, à 10,48 centimes en 2011. Cependant, si l’on circonscrit l’étude aux marges de raffinage, celles-ci ont cru de façon impressionnante uniquement pour le diesel, puisqu’elles ont été multipliées par près de 4 entre 2001 et 2011 passant de 2,6 à 10,2 centimes d’euros. Cette évolution s’explique majoritairement par un manque de capacité structurel pour le raffinage de diesel en Europe. La marge de raffinage, sur l’essence n’a connu qu’une hausse modérée sur la même période.
Cependant, il faut rapprocher cette hausse des marges de raffinage du diesel à l’évolution globale du prix du diesel, qui est passé de 0,8 € à 1,4€. La proposition de François Bayrou sur le renforcement de la concurrence dans le raffinage ne pourra donc qu’avoir un effet marginal. De plus, le secteur du raffinage en Europe est confronté à une situation difficile, peu propice à la hausse de la concurrence : la demande en produits pétroliers est en baisse (-10,8% en 2010) tandis que la concurrence des pays émergents s’accentue, ces derniers n’étant pas soumis à des réglementations environnementales aussi exigeantes qu’au sein de l’Union européenne.
Autre piste pour faire face à la hausse des prix du carburant, le candidat s’engage à « réduire notre dépendance aux énergies fossiles », mais il n’indique pas de solutions précises concernant les transports.
Concernant l’avenir des prix réglementés dans le gaz et l’énergie ou un prix d’accès à l’énergie pour les plus démunis, François Bayrou ne s’est pas encore positionné lors de cette campagne.
Maitrise de la demande
Une partie importante du programme de François Bayrou est consacré à la première source d’énergie : les économies. Pour cela, le centriste propose de “rénover le bâti ancien” grâce à trois mesures d’encouragement : simplification et amplification du mécanisme des certificats d’économie d’énergie, création d’un “organisme public/privé pour accompagner les projets de rénovation énergétique”, ayant pour mission de conseiller les particuliers et entreprises dans leurs travaux d’efficacité énergétique, et enfin, modulation de la taxe sur le foncier bâti en fonction de la performance énergétique des bâtiments. Ces mesures semblent être de bonnes pistes mais aucun objectif chiffré n’est fourni sur ce programme de rénovation.
Organisation du marché
A part l’évocation du renforcement de la concurrence dans le raffinage, François Bayrou ne s’est pas positionné sur l’organisation du marché de l’énergie en France et en Europe. Pourtant, à l’appui de ses ambitions sur le développement des EnR et la rénovation énergétique des bâtiments, des précisions sur le modèle concurrentiel du secteur, le rôle de l’état, l’équilibre économique du marché des EnR ou le cadre visant à l’émergence d’un tissu de PME pour la rénovation énergétique permettrait de rendre plus concrètes ses propositions.