A moins d’un mois du premier tour de l’élection présidentielle, la campagne semble enfin se placer sur le terrain du débat d’idées. Rapport au travail, ouverture de la France à l’Europe et au reste du monde, rôle de l’Etat dans le fonctionnement de l’économie… Les divergences sont nombreuses. Mais qu’en est-il en matière de politiques énergétique et écologique – l’une ne pouvant plus être dissociée de l’autre ?
Sur cette question, un constat s’impose : il est aujourd’hui devenu impossible de briguer la présidence de la République sans parler de transition énergétique et écologique. Cette thématique a irrigué l’ensemble du champ politique et chacun des cinq principaux candidats (François Fillon, Benoît Hamon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon) a désormais son lot de propositions en la matière. Il est d’ailleurs révélateur de constater que pour la première fois depuis 40 ans, aucune candidature écologiste ne sera présentée au premier tour de l’élection, les thématiques habituellement portées par ces candidatures étant désormais reprises (diluées ?) dans d’autres programmes. Assiste-t-on, dès lors, à une « banalisation » de la question énergétique et écologique ?
Si « banalisation » il y a, c’est avant tout parce que les candidats, de l’extrême gauche à l’extrême droite, partagent un même diagnostic : il est devenu urgent d’agir pour lutter contre le changement climatique, à la fois pour préserver l’environnement dans lequel nous vivons, mais également pour prévenir toutes les implications sanitaires, sociales et géopolitiques d’un réchauffement dépassant le seuil des 2°C par rapport à une base pré-industrielle.
Le diagnostic est partagé, mais qu’en est-il, alors, des solutions pour y faire face ? D’une façon générale, et cela dénote d’autres thèmes de campagne, les principaux candidats à l’élection présidentielle partagent bon nombre de solutions, quoiqu’ils s’en défendent. A titre d’exemple, ils s’expriment unanimement en faveur d’une approche locale plus marquée, de circuits courts et promeuvent l’alimentation « bio », autrefois apanage de « bobos » largement raillés par les responsables politiques.
Les différences entre candidats se situent plutôt dans le degré de mise en œuvre de ces solutions. Si tous les candidats soutiennent la décarbonation du mix énergétique et le développement des énergies renouvelables, la vitesse d’évolution de ce mix et les façons de l’encourager, elles, varient. Par ailleurs, les candidats n’accordent pas tous la même portée à leurs propositions écologiques. Les candidats qui se situent à gauche de l’échiquier politique (Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon), proposent de donner une dimension constitutionnelle à la protection de l’environnement (avec l’introduction d’une « règle verte » pour le premier, d’un principe de « préservation des biens communs environnementaux » pour le second).
Un thème enfin, continue d’entretenir le clivage gauche-droite : la part du nucléaire dans la production d’électricité. Les candidats de la France Insoumise et du Parti Socialiste militent pour une sortie à moyen terme de l’atome, quand les candidats Républicain et Frontiste s’expriment, eux, en faveur d’une prolongation de la durée de vie des centrales actuelles. Le candidat d’En Marche se place pour sa part dans la lignée de la Loi relative à la Transition Energétique et s’engage à faire diminuer la part du nucléaire, sans pour autant la réduire à néant.
Au-delà de cette question, les divergences entre candidats ne peuvent cependant être considérées comme fondamentales, ce qui contribue à dépassionner le débat. Cette « banalisation » de la transition énergétique et écologique est a priori une bonne nouvelle : elle montre que la société évolue et que l’offre politique s’adapte en conséquence… Encore faut-il, néanmoins, que les engagements soient tenus et que cette banalisation ne s’accompagne pas, in fine, d’une relégation des thématiques énergétiques et écologiques au rang des sujets annexes. Car la lutte contre le changement climatique, elle, ne peut plus attendre.